René Bidal, Haut-commissaire de la République en Polynésie française, a participé ce jeudi matin à l’ouverture officielle de la deuxième édition du Digital Festival Tahiti. Voici son discours.
« L’an passé, nous inaugurions la première édition du Digital festival au cours duquel les grands enjeux du numérique en Polynésie française avaient été débattus. Douze mois plus tard, le succès de cette initiative est complet et, par l’écho qu’elle a pu avoir, en si peu de temps, la Polynésie française a détourné le regard du digital sur elle, séduisant ceux qui ont compris qu’aucune distance, qu’aucun éloignement ne saurait être un frein à la vitesse de la lumière qu’offre désormais la fibre optique ; cet extraordinaire voyage dans l’ultra rapide et connecté, dont nous ne sommes qu’au début et qui va rapprocher les continents, abolir les frontières de l’intelligence, du savoir et de l’audace entrepreneuriale.
A l’heure où les jeunes générations des nations les plus riches rêvent d’exercer leurs emplois et leurs talents depuis l’endroit où ils aiment être et aux heures qu’ils souhaitent, le nouvel ordre digital autorise de plus en plus cette envie qui, désormais, ne peut plus être considérée comme une utopie.
Un nouvel ordre digital
La nostalgie est une coquetterie de nanti, laissons les jeunes générations qui vont développer ce nouvel ordre digital mondial, imaginer et créer les nouvelles organisations sociales et les nouveaux rapports humains qui en découleront. Par construction mais aussi par nécessité, ce nouvel ordre digital va nous bouleverser, mais c’est celui de nos petits-enfants et n’oublions pas que sans avoir utilisé la vitesse de la lumière, nous avons nous-mêmes bouleversé les références et les règles de vie de nos grands-parents.
Outre l’intérêt d’une interconnexion permanente et immédiate, de très nombreux métiers de demain que, d’ailleurs, nous ne connaissons pas encore, pourront s’exercer depuis n’importe quel endroit de la planète en permettant l’expression de toutes les intelligences et pas seulement celles des Pays les plus développés. Votre digital festival, cher Olivier Kressmann, est une magnifique anticipation de tout ce que je viens de dire ; il est une vitrine de plus en plus contemplée, au cœur du Pacifique ; une démonstration que même dans un territoire archipélagique où l’on apparaît si petit dans cette immensité d’eau, l’envie d’apprendre, d’entreprendre, de conquérir, bref de gagner est encore plus fort qu’ailleurs. C’est le sens du succès que rencontre ce rendez-vous digital auprès de la jeunesse polynésienne, tous niveaux d’étude confondus. Ce rendez-vous, s’il n’est pas encore le « fashion digital » de New York rayonne dans la région Pacifique, suggère l’intérêt et, bientôt, n’en doutez pas, attisera la convoitise ; en atteste la progression du nombre des visiteurs et des inscrits dans les ateliers que vous proposez.
Smart Polynesia : un exemple national sans équivalent
Pour permettre cette réussite, il fallait que l’idée soit favorisée et accompagnée par un contexte favorable et je dois dire que votre collectivité, votre gouvernement, Monsieur le Président de la Polynésie française, a créé les conditions nécessaires dans des délais plutôt brefs : un schéma directeur d’aménagement numérique réalisé en trois mois, au lieu des 24 mois habituellement observés. En outre, le plan « Smart Polynésia » qui constitue un diagnostic précis et un plan d’actions réaliste pour encourager l’essor d’une économie digitale en Polynésie française, est un exemple national qui est d’ailleurs sans équivalent, sachez-le, dans les autres territoires d’Outre-mer. Ce plan permet par un constat réaliste et ambitieux d’être plus que jamais déterminé à relever les défis et appréhender la chance que nous offre le potentiel polynésien. En observant la dynamique et la vitesse de cette démarche, personne ne peut douter que le numérique constitue un réel accélérateur de développement, je dirai même le seul, à moyen terme, et ceux qui en doutent vont économiquement disparaître.
Je tiens à saluer le travail accompli depuis la première édition ; je tiens à vanter l’engagement et la mobilisation de l’équipe organisatrice, animée énergiquement par Olivier Kressmann. Le digital festival est devenu un grand événement régional que vous incarnez tous ici présents ce matin ; je saisis l’occasion pour saluer nos amis du Pacifique qui sont venus très nombreux cette année.
Je veux également souligner que l’engouement rapide que suscite cet événement au-delà des océans fut le meilleur atout pour obtenir de la ministre des Outre-mer un soutien financier pour cette édition. L’État se devait de répondre lui aussi à votre sollicitation.
Des attentes, des espoirs, un fantastique potentiel
Si la Polynésie se mobilise pour le numérique, c’est bien parce qu’existent des attentes, des espoirs et un fantastique potentiel. Nous en avons déjà la démonstration à travers quelques réussites individuelles : je pense notamment à Christian Vanizette, avec Make Sense, ou à Kévin Besson, avec Leadbees. Je pense aussi à l’incubateur Prism et à l’école Poly3D.
Les besoins à satisfaire ne manquent pas et le numérique peut apporter des solutions concrètes dans bien des domaines : la santé, l’éducation, les services publics, le commerce, le tourisme, la protection des écosystèmes naturels et sensibles.
Bref, le champ des possibles est ouvert et, grâce à ce festival, nous pouvons entrevoir les promesses d’un développement rapide et durable de cette économie digitale en Polynésie pas seulement pour les besoins du territoire mais aussi comme partie intégrante de l’économie planétaire avec des Polynésiens qui, depuis Tahiti, Rangiroa, Tubuai ou Nuku Hiva travaillent avec tous les continents. Désormais, cher Président Fritch vous avez manifesté votre volonté politique et, avec l’OPT, vous avez permis de mettre en place l’outil et de le renforcer prochainement. Place maintenant à la volonté d’entreprendre.
Ainsi, la Polynésie française qui a longtemps souffert de sa double insularité peut, comme de nombreux autres pays jusqu’ici isolés, déplacer un peu le centre du Monde qui fut longtemps fixé dans l’hémisphère nord. Le numérique offre une opportunité nouvelle de renverser les paradigmes des siècles passés. Pour un data-center, l’isolement, c’est la sécurité ; pour une SS2I, le décalage horaire c’est l’assurance d’un service continu, pendant que Paris dort, Tahiti travaille et ce qui fut considéré comme un lourd handicap peut devenir un atout maître.
Vous l’aurez compris, j’ai une certitude que rien ne pourra affecter : la Polynésie française dispose de sérieux atouts pour exister dans le nouveau monde de l’économie numérique. Le premier intérêt de ce digital festival demeure dans l’avance qu’il a pris sur tous les autres. L’information fibrée va très vite et avec elle les réputations ; la vôtre est déjà faite et le succès ira en grandissant emportant, avec lui, plus d’emplois pour les Polynésiens et plus de reconnaissance internationale pour les talents individuels et collectifs de ce magnifique territoire. »